Libération, jeudi 4 mars 2021, p. 22
La décision prise par le maire écologiste de Lyon de faire un repas végétarien dans les cantines a déclenché un débat que Libération dénonce comme incroyablement arriéré : dans les assiettes des élèves, avec les légumes, on servirait surtout une idéologie – la bienpensante non-consommation de viande serait un dommage collatéral de la volonté de préserver le climat, quitte à bousculer les traditions. L’idéologie pourfendue, Libération propose de la nommer « végano-gauchisme ». L’allusion au supposé « islamo-gauchisme » qui, selon Frédérique Vidal, gangrénerait la société est évidente. La formation du mot et ses connotations sont les mêmes : un composé désadjectival par une suffixation en -o qui convoque un stéréotype désinvolte et pratique un amalgame de mauvaise foi, comme pour une argumentation de meeting ; et bien sûr la présence du composant final « gauchisme ». Or le sillage dialogique laissé par « islamo-gauchisme » taxe d’absurde les propos de l’ennemi et ridiculise la position pro-viande. La messe est dite : les adversaires du menu végétarien rejoindraient dans l’histoire, égaux en vanité et peut-être en ridicule, les don Quichotte ennemis de la gauche, du progrès et du savoir.