Le 16 février 2021, à l’occasion d’une visioconférence consacrée au Sahel, Emmanuel Macron affrontait le dilemme suivant : rester au Sahel où l’armée française est présente avec l’opération Barkhane ; ou bien le quitter au risque de la « talibanisation », car l’opération « s’enlise » (Marianne, 19 mars). Et pourquoi donc ? Willem répond le même jour dans Libération.
L’armée est doublement inadaptée.
D’abord elle n’est vraiment pas de taille. Une antithèse oppose dans le dessin de Willem le petit nombre des militaires (très exactement une poignée : cinq), au grand nombre des potentiels djihadistes. Le dessin opère de ces derniers, représentés par leur stéréotype (crânes rasés et barbes sans moustache des salafistes) une quantification indéfinie en ne faisant qu’esquisser le sommet lointain des crânes et en laissant des blancs (donc il y en a beaucoup et ils sont innombrables).
Ensuite et surtout il y a l’antithèse principale : pour les cinq militaires, il n’y a aucun djihadiste ; mais pour le lecteur, ils grouillent. Le dessin, polyphonique, met en scène et hiérarchise deux points de vue. Les voyant du dessus, les militaires peuvent prendre les crânes pour des cailloux. Mais les voyant de face, le lecteur a de manière décisive un point de vue plus ample : ce sont des salafistes. Les militaires ont la berlue. Déjà mal outillés dans leur petit bus cahotant (métonymie de l’instrument et synecdoque de la partie), ils sont tout bonnement aveugles à l’océan (métaphore implicite) des djihadistes : ils ne trouveraient pas d’eau dans la mer.