
Marine Le Pen, Fréjus, 12 septembre 2021 (MAXPPP IAN LANGSDON)
On ne pouvait s’empêcher de penser au proverbe « Noël au balcon, Pâques aux tisons ! » en entendant Marine Le Pen déclarer à Fréjus, le 12 septembre : « Les délinquants français en prison, les étrangers, dans l’avion ! ». L’homéotéleute – c’est-à-dire la présence de syllabes finales identiques phoniquement – est souvent porteur d’un effet de comique. A fortiori, l’emploi de cette figure de style, renforcée par une commune assonance en « on », conférait au propos de la ci-devant présidente du ci-devant Front national une légèreté peu adaptée, ni à la solennité de l’élection présidentielle, ni à la gravité des problèmes liés à l’immigration et à l’insécurité. Peut-être même certains auditeurs de la candidate auront-ils repensé à la parodie d’un ancien chant de supporters prêtée aux Bleus lors de leur retour prématuré de Knysna en 2010 : « On est dans l’avion, on est dans l’avion… ! »
La candidate éprouverait-elle décidément de la difficulté à se construire un éthos de présidentiable ? Ou bien concèderait-elle inconsciemment le caractère pour le moins simpliste si ce n’est peu sérieux de sa proposition ? Toujours est-il qu’au-delà de ce qui pourrait apparaître comme un lapsus d’autodérision, rabaissant ce qui aurait dû être un slogan politique en une boutade de comptoir, ses partisans auront été satisfaits d’entendre cette nouvelle mise en mots du clivage constitutif de leur courant politique : les Français (même délinquants) versus les étrangers. Quant à la métonymie de « l’avion », loin d’avoir la fraîcheur de la créativité rhétorique, elle était constitutive d’un lieu commun, depuis l’initiative du ministre de l’Intérieur Charles Pasqua expulsant en 1986 par « charter » une centaine de Maliens jugés indésirables. Comme il le disait si bien, ils ont bien « les mêmes valeurs »…