
“Des matadors […] aux matamores, il n’y a qu’un pas”

François Asselineau, France 2, 17 avril 2017
La structure « X, c’est Y », souvent exploitée en politique, permet de poser tantôt une équivalence frappante, tantôt de souligner une opposition sur le mode du paradoxe (« le bien, c’est le mal »). Un effet que François Asselineau renforce au moyen d’un parallélisme et d’une paronomase, lorsqu’il affirme que « le vote utile […] est un vote futile ». Proches par leurs sonorités, les adjectifs « utile » et « futile » possèdent en effet des significations antithétiques. Contrairement à d’autres épithètes accolées au mot « vote » (« blanc », « nul », par exemple), « utile » a une valeur adverbiale : « voter utile », c’est voter « utilement », c’est-à-dire de manière stratégique, en suivant les sondages. Une stratégie qui pénaliserait les « petits » candidats, comme celui de l’Union populaire républicaine. Ayant dissipé la croyance dans l’efficacité du « vote utile », ce dernier réaffirme la consistance de ses propres objectifs : « Les électeurs français, dans leur majorité, veulent de la solidité, de l’honnêteté, de la compétence. Ils en ont assez des formules marketing ». Celle qui aboutit à cette conclusion n’en est donc pas une ?
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(Alexis Corbière, Le Monde, 14/02/2017)
Le porte-parole de Jean-Luc Mélenchon reprend le slogan avec lequel Georges Marchais avait convaincu le Parti communiste de se rallier au programme commun porté par les socialistes. Dans un rapport pesant le pour et le contre, ce dernier s’inquiétait déjà des “combinaisons électoralistes” auxquelles l’union pouvait donner lieu. Alexis Corbière synthétise le dilemme en une paronomase évocatrice, dévoilant la “combine” cachée derrière le “combat”. S’agit-il de mettre à distance toute alliance avec Benoît Hamon ? La référence au programme commun laisserait plutôt penser le contraire…
Christiane Taubira, investiture de Benoît Hamon, 5/02/2017)
Après Laurent Joffrin qui distinguait “la gauche qui rêve” et “la gauche qui gère”, c’est à Christiane Taubira de mettre en balance les deux gauches à travers des termes à la sonorité voisine mais aux significations divergentes. Cherche-t-elle ainsi à souligner leurs différences tout en faisant entendre un possible rapprochement ? La paronomase semble plutôt ici une réponse à tous ceux qui en ont usé contre le projet de Benoît Hamon. Elle permet en effet de renverser les jeux d’oppositions qui visent à disqualifier la gauche “idéaliste” et non “réaliste”, “poétique” et non “prosaïque”, “chimérique” et non “pragmatique” (Alain Duhamel, Libération, 25/01/2017) : cette dernière n’a plus rien d’hypothétique, elle vient d’entrer de plain-pied dans la bataille électorale.