Yves Veyrier, France culture, 11 décembre 2019
Sur France Culture, mercredi 11 décembre 2019, Yves Veyrier – secrétaire général de Force Ouvrière – explique pourquoi il a qualifié dans France Dimanche la réforme des retraites de « monstre » : il pensait à Frankenstein. Il précise : « J’ai dit que ce projet de régime unique par points c’était un peu le Frankenstein des retraites, la créature échappe à son créateur ». Or, on le sait en lisant Mary Shelley, la créature n’a pas de nom, contrairement au docteur Frankenstein qui l’a animée : bel exemple de métonymie cachée (le créateur pour la créature), c’est-à-dire peu ou prou devenue lexicalisée, d’autant plus que la métaphore fait écran et, elle aussi, « échappe à son créateur ». La réforme des retraites n’est pas seulement, comme le dit Yves Veyrier, devenue incontrôlable, fruit d’un geste irrémédiable : c’est aussi un monstre couturé, fait de bric et de broc, et si étranger au monde qu’il est tout juste bon à éradiquer. Mais le motif du geste irrémédiable a un avantage : remontant au moins au mythe de Prométhée, ce topos s’applique à tous les apprentis sorciers et gouverne plus que jamais la conception que le XXIe siècle se fait de l’histoire humaine. Révolution industrielle, révolution numérique et désormais changement climatique… La réforme des retraites rejoint les grands fléaux de l’anthropocène.