
(Valérie Pécresse le 12 décembre 2021 sur France 3)
Si cette phrase a été immédiatement moquée c’est parce que deux chaînes métonymiques s’affrontent : l’une, traditionnelle, que Valérie Pécresse explicite, des objets ou pratiques réputés préalablement emblématiques de la France dans un prédiscours qui forme un réservoir dialogique collectif ; l’autre, laissée implicite, qui intègre la France à un univers non mémorisé et peut-être plus actuel, fait d’égalité entre les sexes, de tolérance vis-à-vis de toute croyance et de respect de la biodiversité – en fait d’univers traditionnel c’est un véritable cliché de la francité que promeut la candidate : outre le foie gras, il y a aussi le sapin de Noël, miss France et le Tour de France, tous objets polémiques (le foie gras comme indifférence aux souffrances animales, le sapin de Noël comme référence religieuse dans une république laïque, le concours et la course comme machistes au pays de l’égalité). Les brandir, ce n’est pas seulement cibler la France mais surtout, par une autre métonymie établie par le souvenir de débats récents, affirmer une position politique. Les métonymies, réputées tropes référentiels (elles exploiteraient sans médiation nos connaissances sur l’univers), exploitent sans surprise une conception du monde plutôt que le monde lui-même ; celles de Valérie Pécresse, rien moins que neutre, sont sans doute délibérément « conservatrices ». Ainsi en se présentant innocemment comme énonçant un réel tout simple, les discours de campagne, en un rêve de performativité, cherchent-ils plutôt à l’instaurer.