(Willem, Libération, 28 novembre 2020)
Le 28 novembre, Willem campe en première page de Libération une antithèse multidimensionnelle. Assis jambes croisées sur une grosse matraque brandie, comme le plus accueillant des hôtes, Macron tout petit minimise le déploiement de la violence, démesurée, en grande partie hors cadre. Son état de disponibilité contraste avec une action imminente, croquée sur le vif : la matraque, résolument empoignée, est en effet sur le point de s’abattre. Aimable est le visage de Macron ; menaçante est la matraque, métonymie d’une politique brutalement répressive. Par une métaphore chromatique habituelle, Macron, immaculé, semble incarner le bien ; mais ce bien n’est que de façade, le premier plan dévoilant une noire violence à l’arrière-plan. Macron regarde à droite, le bras armé affronte les migrants à sa gauche ; cette métonymie aussi vieille que la république pourrait signifier que Macron couvre sans le dire une politique de droite, voire d’extrême droite…
Par l’organisation de l’image, cette antithèse décline le « en même temps » sur le double mode de la duplicité (il ne vous arrivera pas ce que je vous cache/ce qui est derrière moi) et de la dénégation (je ne vois pas la réalité). Gant de velours devant, main de fer derrière, le gant ignorant ou dédaignant ce que fait la main, Macron renverse les valeurs hédonistes d’un courant auquel tout porte à croire qu’il s’oppose : sous la plage, les pavés.