Le 30 novembre 2021 au journal de 20 h de TF1, face à Gilles Bouleau, à propos de Joséphine Baker tout juste entrée au Panthéon, Éric Zemmour déclare : « Joséphine Baker avait un prénom français » (rappelons au passage que plus de 300 000 Américaines ont été prénommées « Joséphine » depuis 1880). On peut y déceler divers sous-entendus en vertu de la maxime de pertinence (celle-ci reconnaît que les formulations littérales ont un but et fonde des implicatures ou inférences conversationnelles), notamment celui-ci : étrangère (ce qui est faux, puisqu’elle est devenue française en 1937), elle se serait quand même adaptée à la culture française (implicature confirmée par la suite du propos : « surtout, c’est l’exemple même du modèle d’assimilation à l’ancienne, que je veux restaurer »). Mais le décodage des sous-entendus, aléatoires et dépendant du contexte, encourt toujours le reproche de reposer sur une pétition de principe (Éric Zemmour, ainsi que les idées qu’on lui prête, faisant d’ailleurs eux-mêmes partie dudit contexte).
Rien de tel avec un présupposé comme celui que propose le site Chlomohebdo en ajoutant dans sa paraphrase l’intensif « bien » (qui ici consacre un stéréotype accompli) et « au moins » (connecteur qui appartient à une échelle argumentative): le présupposé qui lui est attaché est implicite lui aussi, mais linguistiquement irrécusable. Aussi le « prénom français » est-il présenté, soit comme une circonstance atténuante dont peut bénéficier Joséphine pour contrebalancer l’ensemble de ses travers, soit comme le résultat d’un choix exemplaire qui motive son repêchage au sein des autres « étrangers » (/à bon entendeur salut : prenez-en de la graine/). On ne peut s’empêcher de voir là une stratégie de l’arroseur arrosé ou, pour le dire en termes rhétoriques, de la rétorsion : Chlomohebdo dit tout haut ce qu’Éric Zemmour, selon lui et en l’occurrence (car telle n’est pas son habitude), pense tout bas.