Cet aphorisme s’inscrit dans la longue lignée des slogans et graffitis qui condamnent la classe bourgeoise. Cette dernière n’y est pas caractérisée par sa position dans les rapports de production et de domination, mais par un trait plus culturel : son attitude à l’égard du plaisir. Ces quelques mots font donc moins référence au marxisme qu’à la figure stéréotypée du bourgeois, laquelle, dès le XIXe siècle, s’oppose dans les représentations sociales à la bohème, dont le monde estudiantin a toujours été proche. Contrairement à cette bohème souvent identifiée à une avant-garde, elle est marquée par la médiocrité de ses goûts, inaccessible à l’idéal, engluée dans un consumérisme satisfait et conformiste. Tous ses plaisirs ne peuvent donc être que « dégradés », « abîmés », et ce « d’une manière infâmante », c’est-à-dire déchus de la place qui leur est assignée par les révolutionnaires de mai. Pour ceux qui appellent au contraire à jouir sans entraves ni interdits, les loisirs bourgeois ne sont pas seulement méprisables : ils pourraient même nous « gâcher le plaisir » !