Ce proverbe chinois emprunte à l’expérience paysanne immoriale des contrées sujettes à la sécheresse, qu’une brindille enflammée suffit à incendier. Par métaphore, il désigne les petites causes engendrant de grands effets, à l’image du feu se propageant de proche en proche à toute la plaine. Mao en appréciait sans doute le pouvoir évocateur. Il en fait en 1930 le titre d’un texte qui vise à conjurer le pessimisme auquel le parti communiste chinois est alors en proie. Les positions de la révolution sont certes réduites mais la situation du pays, en plein chaos, rend selon lui prometteurs les soulèvements localisés d’ouvriers, de paysans, d’étudiants ou de soldats : « la Chine tout entière est jonchée de bois sec qui va s’embraser bientôt ». L’image n’est pas étrangère au marxisme, qui l’a popularisée à travers la revue du Parti ouvrier social-démocrate de Russie, dirigée entre autres par Lénine : Iskra, l’Étincelle, dont le titre, souvent repris, renvoie plus généralement à tout ce qui pourrait déclencher la révolution. Friands des aphorismes du Grand Timonier, les maoïstes voient dans le proverbe bien plus qu’un diagnostic ou un encouragement : un mot d’ordre qui doit guider leur action dans les mobilisations des années 1960, et qui appelle diverses interprétations. L’étincelle qui allumera la révolution naîtra-t-elle des occupations d’usine, des mouvements étudiants ou encore des violences policières ? Et que faire pour en devenir les grands tisonniers ?
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