Libération, 8 mai 2019, p. 24.
Emmanuel Macron et deux oiseaux tombent à pic sans que rien ne puisse amortir leur chute : aucune végétation, un caillou, des crevasses, un sol déchiré, un animal maigre et mort, un autre sous forme de squelette – un monde inhospitalier, sec, désert. La catastrophe écologique qui se profile à tous les horizons non climato-sceptiques apparaît certaine, ce qu’on peut considérer comme une forme d’hypotypose (un événement est présenté au destinataire du discours, pour le commotionner, comme s’il pouvait l’observer en détail).
Et qu’observe-t-il ? Des oiseaux tombant du ciel ; c’est désolant, mais ça s’explique : après tout ce sont des volatiles. Macron non. Sauf à voir un couple imagé de métaphores : l’illusion (il planait dans les hauteurs), la désillusion (la chute est rude). La désillusion, ou plutôt l’illusoire désillusion : manifestement il n’est plus temps de s’occuper de la biodiversité.
Car le dessin est de part en part hyperbolique. Le désert, ce n’est plus la nature menacée mais la nature disparue. Le profil maximalement aérodynamique des deux oiseaux latéraux et du Macron central (peu corpulent, il est particulièrement apte à fendre les airs) rend leur chute inopinée et bien visible. Enfin quant à la chute, elle est saisie in extremis, juste avant l’impact irrémédiable. Concentrant le sens de son dessin, Willem mythifie Macron, mais c’est hélas pour le rapprocher d’Icare (il n’est pas le premier), qui, croyant voler au-dessus des événements, s’est écrasé au sol.