Libération, 5 janvier 2021, p. 22.

Willem livre en ce début d’année un regard méta-discursif sur les vœux. Une métaphore de base préserve notre sol conceptuel : 2021 est une nouvelle étape sur le chemin du temps. Mais une double antithèse structure le dessin. D’abord, dans l’image, celle de l’extrême écart entre les générations : un vieillard qui arrêtera là son voyage pousse vers l’avant un garçonnet qui, consterné, commence le sien. Ensuite, entre le linguistique et l’iconique, l’absence totale dans la situation présentée par le dessin de quoi que ce soit d’euphorique qui puisse faire écho au souhait. L’avenir qui s’annonce pour 2021 ne promet qu’une vaste isotopie dysphorique, tout élément y évoquant par métonymie le drame actuel auquel il participe. Couple de pangolins ? Pandémie. Feu à l’horizon ? Amazonie en flammes. Avions larguant des bombes ? Guerres planétaires. Paquebots coulant, humains surnageant ? Noyade des migrants. Homme décapité ? Attentat islamiste. Etc. Ce monde n’est pas imaginaire, c’est le nôtre. Nous serons cet homme effaré qui s’agrippe à la falaise pour ne pas épouser le sombre avenir promis. L’ironie et le sarcasme ne sont pas loin : les bons vœux semblent purement phatiques.