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Auteur/autrice : Chloé Gaboriaux

Enseignante-chercheuse à Sciences Po Lyon et au laboratoire Triangle. Voir ma page personnelle sur le site du laboratoire Triangle.

La métaphore en politique

24 janvier 202324 janvier 2023 Chloé Gaboriaux

Appel à communications

Deuxièmes rencontres de Jarnac “Paroles politiques”, Institut François Mitterrand, vendredi 30 juin 2023

Coordination : Paul Bacot et Yves Déloye

De très longue date, la métaphore a été au centre d’une abondante littérature. Dans la période contemporaine, ce sont tout naturellement les sciences du langage, dans leurs différentes spécialités, qui en ont fourni la part principale, à côté d’autres disciplines des sciences humaines et sociales, comme la psychologie ou la philosophie. Considérée comme la figure rhétorique la plus utilisée, y compris dans la vie ordinaire (Lakoff & Johnson, 1985), voire la figure par excellence, elle a été décrite comme remplissant trois fonctions principales (Bonhomme, 2002) : une fonction esthétique (longtemps la seule prise en considération), en cela qu’elle enjolive le discours, valorisant par là-même son auteur ou autrice ; une fonction cognitive, en cela qu’elle rend visible ce qui n’est pas immédiatement perçu ; une fonction persuasive, en cela qu’elle produit l’adhésion du récepteur à une certaine représentation de la réalité, malgré ou du fait de son caractère fallacieux (Plantin, 2016), voire une forme de manipulation (Jamet et Terry dir., 2020). La métaphore joue sur un « ça va de soi » qu’il faut replacer dans un relativisme culturel (Goatly, 2007).

La dimension coopérative de la métaphore a été largement soulignée : elle ne peut remplir son office que si la personne qui lit ou entend le propos concerné sait l’interpréter. Il faut bien comprendre ce que les deux objets placés dans la comparaison condensée et implicite qu’est la métaphore ont en commun : que révèle cette intersection montrée entre les deux domaines connectés ? Le fameux slogan « Giscard à la barre ! » ne fonctionne que si son destinataire entend de quelle barre il s’agit et à quoi elle sert : « son élucidation est confiée à l’auditoire » (Plantin, 2016, p. 385). De ce fait, si la figure métaphorique, comme on l’a dit, valorise la personne qui y a recours, elle valorise aussi celle qui la reçoit correctement – ou qui l’interprète à sa façon (Davidson, 1978).

La figure métaphorique repose sur un écart – entre l’usage habituel du mot et l’usage décalé qui en est fait. Il ne faut donc négliger ni l’effet de surprise que produit la métaphore (pour autant qu’elle ne soit pas figée dans un cliché bien usé), ni sa dimension comique ou humoristique, pouvant aller jusqu’à l’insulte. Elle est particulièrement bien adaptée à la fabrique des « petites phrases » (Boyer & Gaboriaux, 2018), les quelques mots qui la constituent retenant l’attention et pouvant devenir cet énoncé détaché circulant dans les médias. On joue aussi sur l’économie langagière : un mot, parce qu’il est utilisé métaphoriquement, dit beaucoup de choses à moindre coût.

La métaphore est un trope, en ce qu’elle produit un déplacement : pour reprendre l’exemple déjà mobilisé, on va et vient entre le domaine sémantique du gouvernement et celui du gouvernail, entre le domaine politique et le domaine maritime – l’un des marqueurs du discours gaullien (Bon, 1986). Ce rapprochement peut avoir un usage positif, comme ici, ce qui est suggéré étant la capacité à conduire le navire-pays contre vents et marées, mais peut aussi avoir un usage négatif, comme lorsqu’on parle d’un candidat à l’élection présidentielle comme d’un « capitaine de pédalo ». Qu’il s’agisse d’une métaphore de structure analogique ou de structure homologique (Constantin de Chanay & Rémi, 2002), il convient de mettre au jour la diversité des catégories mises en jeu, la métaphore pouvant s’exprimer par des formes variées : verbe, adjectif, adverbe, mot grammatical…

Bien sûr, on a déjà beaucoup écrit sur l’utilisation de la figure métaphorique en politique (Gingras, 1996 ; Gonzalez, 2012). Les domaines ressources mobilisés à cet effet ont été listés. On sait que chez les acteurs de la vie politique, comme chez les personnes qui la commentent ou l’analysent, certaines métaphores sont très présentes : maritimes et plus largement liquides (Bernardot, 2016 ; Mecquenem, 2021), guerrières (Howe, 1988 ; Gauthier, 1994), sportives (Howe, 1988), météorologiques, sanitaires, organiques (Lemoine, 2001). D’autres nous emmènent vers la vie sentimentale, le jeu (Ching, 1993), la famille, le théâtre, la religion, le cinéma, la construction, le cirque, le carnaval, le commerce et la publicité… Sans oublier l’omniprésence de la métaphore spatiale, qui sert à délimiter les camps et à situer les acteurs par rapport à des clivages (Bacot & Rémi dir., 2007). Mais en quoi le recours à cette figure de style présente-t-elle quelques spécificités lorsqu’il s’agit de parler en, ou de, politique ? Peut-on considérer qu’elle est plus fréquente dans ce domaine de la vie sociale que dans d’autres ? Remplit-elle alors des fonctions particulières ? Peut-on en objectiver et en mesurer l’efficacité propre (Bosman, 1987 ; Mio, 1997, Carvier & Pikalo dir., 2008 ; Perrez et Reuchamps dir., 2015 ; Boeynaems et al., 2017 ; Legein, Vendeleene et al., 2022) ?

Au-delà de l’examen d’un probable lien étroit entre le discours politique et le dispositif rhétorique en question, on tentera d’opérer des distinctions majeures selon les critères en usage en sciences sociales et tout particulièrement en science politique. La métaphore est-elle autant utilisée, et de la même façon, selon les caractéristiques personnelles, sociales et idéologiques du locuteur (âge, genre, profession, origine sociale et ethnique, mais aussi place dans le jeu politique) ; selon les conjonctures politiques ; selon les époques, distinguées dans le temps long et dans le temps court ; selon les régimes politiques et selon les pays ou les régions ? De même, le recours à la métaphore dans le journalisme politique ou dans la pratique politologique connaît-il des variations, et selon quelles modalités ? D’une manière générale, en politique ou à propos de la politique, quels sont les effets attendus et les effets obtenus par le recours à la métaphore ? Ainsi, puisqu’en déplaçant, la métaphore détourne, on pourra se demander si elle ne contribue pas à un certain désenchantement de la politique, en même temps qu’à sa mise en spectacle ou encore à sa simplification excessive. Plus largement, on s’interrogera sur son rôle dans la construction et la structuration de la réalité politique, à travers l’apport de cadres interprétatifs – Paul Ricoeur (1975) parle de « réécriture de la réalité » par la métaphore.

Tout a-t-il été dit sur l’usage de la métaphore dans le champ politique ? Nous faisons ici le pari que beaucoup peut encore être apporté, par des études usant de méthodologies variées et portant sur des objets diversifiés : discours, ouvrages, circulaires électorales, tracts, débats, interviews, pour s’en tenir à la seule parole politicienne, mais aussi articles, études, éditoriaux, livres de journalistes ou de politistes – voire propos de citoyens « ordinaires » (Heyvaert et al., 2020). Sur l’aspect de la relation entre science politique et langage métaphorique, on ne pourra négliger une question particulièrement sensible : la métaphore est-elle soluble dans la pratique scientifique ? A priori, la réponse est totalement négative, la science ayant besoin d’une terminologie excluant l’ambiguïté, laquelle est une dimension constitutive de la métaphore. Mais est-ce aussi simple ?

Last but not least, il ne serait peut-être pas hors-sujet de prendre en considération, non seulement les métaphores utilisées dans le domaine politique, mais aussi les métaphores politiques présentes dans d’autres domaines de la vie sociale : ne dit-on pas qu’une équipe est « en ballottage favorable » dans une compétition sportive ?Du fait de la nature des Rencontres « Paroles politiques » de Jarnac et notamment de celle de la thématique retenue pour leur deuxième saison, la pluridisciplinarité est vivement souhaitée. Si cet appel concerne notamment les sciences du langage et les sciences du politique, il s’adresse aussi à d’autres sciences humaines et sociales.

Les propositions de communications (5000 signes environ, brève bibliographie comprise) devront parvenir aux coordinateurs (paul.bacot@sciencespo-lyon.fr et y.deloye@sciencespobordeaux.fr) avant le lundi 20 février 2023. Elles seront examinées par le Comité scientifique des Rencontres. Les réponses seront adressées aux soumissionnaires au plus tard le lundi 20 mars 2023. Les frais de déplacement et de séjour des participants seront pris en charge par l’Institut. Une publication des contributions est programmée, comme pour les Premières Rencontres de 2022 (Bacot, Paul ; Déloye, Yves et Gorce Gaëtan, dir., à paraître, Quand la langue politique fourche. Lapsus, erreurs et malentendus, Paris, L’Harmattan, collection « Langue & Parole »).

Eléments de bibliographie

Bacot, Paul et Rémi-Giraud, Sylvianne, dir., 2002, « Les métaphores spatiales en politique », Mots. Les langages du politique, 68.

Bacot, Paul et Rémi-Giraud, Sylvianne, dir., 2007, Mots de l’espace et conflictualité sociale, Paris, L’Harmattan.

Bernardot, Marc, 2016, « De Lesbos à Calais. S’enfoncer dans la métaphore liquide », in Lequette, Samuel et Le Vergos, Delphine, dir., Décamper. De Lampedusa à Calais, Paris, La Découverte, p. 36-48.

Bertrand, Dominique, 2013, Nature et politique. Logique des métaphores telluriques, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal.

Boeynaems, Amber ; Burgers, Christian ; Konijn, Elly A. et Steen, Gerard J., 2017, « The Effects of Metaphorical Framing on Political Persuasion: A Systematic Literature Review », Metaphor and Symbol, 32/2, p. 118-134.

Bon, Frédéric, 1985, « Langage et politique », in Grawitz, Madeleine et Lecas, Jean, dir., Traité de science politique, Paris, Presses universitaires de France, Tome 3, p. 537-573.  

Bonhomme, Marc, 2002, « Métaphore », in Charaudeau, Patrick et Maingueneau, Dominique, Dictionnaire d’analyse du discours, Paris, Seuil, p. 375-378.

Bosman, Jan, 1987, « Persuasive Effects of Political Metaphors », Metaphor and Symbolic Activity, 2/2, p. 97-113.

Boyer, Henri et Gaboriaux, Chloé, dir., 2018, « Les ‘petites phrases’ », Mots. Les langages du politique, 117.

Carver, Terrell et Pikalo, Jernej, dir., 2008, Political Language and Metaphor: Interpreting and Changing the World, Londres, Routledge.

Charbonnel, Nadine et Kleiber, Georges, dir., 1999, La métaphore entre philosophie et rhétorique, Paris, Presses universitaires de France.

Charteris-Black, Jonathan, 2005, Politicians and Rhetoric. The Persuasive Power of Metaphors, Basingstoke, Palgrave Macmillan.

Charteris-Black, Jonathan, 2014, Analysing Political Speeches: Rhetoric, Discourse and Metaphor, Basingstoke, Palgrave Macmillan.

Charteris-Black, Jonathan, 2017, « Competition metaphors and ideology. Life as a race », in Wodak, Ruth et Forchtner, Bernard, dir., The Routledge Handbook of Language and Politics, London, Routledge, p. .

Ching, Marvin K.L., 1993, « Games and Play : Pervasive Metaphors in American Life », Metaphor and Symbolic Activity, 8/1, p. 43-65.

Constantin de Chanay, Hugues et Rémi-Giraud, Sylvianne, 2002, « ‘Espèces d’espaces’. Approche linguistique et sémiotique de la métaphore », Mots. Les langages du politique, 68, p. 75-105.

Cunillera Domènech, Montserrat, 2010, « Les métaphores dans le discours politique », Synergies Espagne, 3, p. 107-117.

Davidson, Donald, 1978, « What Metaphors Mean », Critical Inquiry, 5/1, p. 31-47.

Descimon, Robert, 1992, « Les fonctions de la métaphore du mariage politique du roi et de la république en France, XVe-XVIIIe siècles », Annales, 47/6, p. 1127-1147.

Edelman, Murray J., 1971, Politics as Symbolic Action: Mass Arousal and Quiescence, Chicago, Markham.

Edelman, Murray J., 1988, Constructing the Political Spectacle, Chicago, The University of Chicago Press.

Gauthier, Gilles, 1994, « La métaphore guerrière dans la communication politique », Recherches en communication, 1, p. 131-147.

Gibbs, Raymond W. Jr., 2015, « The allegorical character of political metaphors in discourse », Metaphor and the Social World, 5/2, p. 264-282.

Gingras, Anne-Marie, 1996, « Les métaphores dans le langage politique », Politique et Sociétés, 30, p. 159–171.

Goatly, Andrew, 2007, Washing the Brain. Metaphor and Hidden Ideology, Amsterdam, John Benjamins.

González García, José M., 2012, Métaphores du pouvoir, Mix, trad. de l’espagnol par Aurélien Talbot (Metáforas del poder, 1998, Madrid, Alianza Editorial).

Heyvaert, Pauline ; Randour, François ; Dodeigne, Jérémy ; Perrez, Julien et Reuchamps, Min, 2020, « Metaphors in political communication. A case study of the use of deliberate metaphors in non-institutional political interviews », Journal of Language and Politics, 19/2, p. 201-225

Howe, Nicholas, 1988, « Metaphor in Contemporary American Political Discourse », Metaphor and Symbolic Activity, 3/2, p. 87-104.

Jamet, Denis et Terry, Adeline, dir., 2020, « Metaphors We Manipulate with », ELAD-SILDA, 5.

Koroleva, Iuliia, 2018, La métaphore conceptuelle dans le discours politique russe contemporain, Thèse, Université Toulouse-Jean Jaurès.

Lakoff, George et Johnson, Mark, 1985, Les métaphores dans la vie quotidienne, Paris, Minuit, Traduit de l’anglais (États-Unis) par Michel de Fornel avec la collaboration de Jean-Jacques Lecercle [Metaphors We Live By, Chicago, The University of Chicago Presse, 1980].

Lala, Marie-Christine, 2005, « La métaphore et le linguiste », Figures de la psychanalyse, 11, p. 145-161.

Laroche, Hervé, 2022, Dictionnaire des clichés littéraires, Arléa.

Le Guern, Michel, 1973, Sémantique de la métaphore et de la métonymie, Paris, Larousse.

Legein, Thomas, Vendeleene, Audrey et al., 2022, « Metaphors, political knowledge and the basic income debate in Belgium. An experimental stydy of the framing impact of metaphors on political représentations », Metaphor and the Social World,  https://doi.org/10.1075/msw.20015.van

Lemoine, Maël, 2001, « Remarques sur la métaphore de l’organisme en politique. Les principes de la philosophie et les deux sources de la morale et de la religion », Les Études philosophiques, 4/59, p. 479-497.

Marchetti, Melina, 2022, « La métaphore dans le lieu commun. L’exemple de l’affiche du mouton noir de l’UDC », Fabula / Les colloques, Lieu(x) commun(s) : quand les œuvres rassemblent, http://www.fabula.org/lodel/colloques/index.php?id=8543.

Mecquenem, Isabelle de, 2021, « La ‘démocratie liquide’ : sur les traces d’une métaphore à succès, The Conversation, https://theconversation.com/la-democratie-liquide-sur-les-traces-dune-metaphore-a-succes-170127

Mio, Jeffery Scott, 1997, « Metaphor and Politics », Metaphor and Symbol, 12/2, p. 113-133.

Musolff, Andreas, 2016, Political Metaphor Analysis. Discourse and Scenarios, London & New York, Bloomsbury Academic.

Olivar, José Alberto, 2010, « La construction de la modernité. Métaphores et politique dans deux discours de Marcos Pérez Jiménez (1953-1957) », Letras, 52/82, p. 157-173.

Pankake, Ann, « Taken by Storm: The Exportation of Metaphor in the Persian Gulf War », Metaphor and Symbolic Activity, 8/4, p. 281-295.

Patiño-Lakatos, Gabriela, 2012, « Dimension pragmatique de la métaphore. Discours politique, référence et monde », in Aubry, Laurence et Turpin, Béatrice, Victor Klemperer. Repenser le langage totalitaire, Paris, CNRS Editions.

Perelman, Chaïm et Olbrechts-Tyteca, Lucie, 1970, Traité de l’argumentation. La nouvelle rhétorique, Bruxelles, Editions de l’Université de Bruxelles (1e édition 1958, Paris, PUF, 2 volumes).

Perrez, Julien ; Reuchamps, Min et Thibodeau, Paul H., dir., 2012, Variation in Political Metaphor, Amsterdam, John Benjamins Publishing Compagny.

Perrez, Julien et Reuchamps, Min, 2012, « Métaphores conceptuelles dans les discours citoyens en Belgique », in Perrez, Julien et Reuchamps, Min, dir., Les relations communautaires en Belgique. Approches politiques et linguistiques, Paris / Louvain-la-Neuve, L’Harmattan / Academia, p. 133-158.

Perrez, Julien et Reuchamps, Min, dir., 2015, « The political impact of metaphors », Metaphor and the Social World, 5/2.

Pinere Pinero, Gracia, 2020, « Métaphore intertextuelle et deixis idéologique dans le discours politique. Répercussions sur la traduction », Des mots aux actes,
9, Traductologie et discours : approches théoriques et pragmatiques
, p. 69-85.

Plantin, Christian, dir., 1993, Lieux communs, topoï, stéréotypes, clichés, Paris, Kimé.

Plantin, Christian, 2016, « Métaphore, Analogie, Modèle », in Plantin, Christian, Dictionnaire de l’argumentation. Une introduction aux études d’argumentation, Lyon, ENS Editions, p. 385-390.

Read, Stephen J. ; Cesa, Ian L. ; Jones, David K. et Collins, Nancy L., 1990, « When Is the Federal Budget Like a Baby ? Metraphor in Political Rhetoric », Metaphor and Symbolic Activity, 5/3, p. 125-140.

Ricoeur, Paul, 1975, La métaphore vive, Paris, Seuil.

Rigotti, Francesca, 1990, « La théorie politique et ses métaphores »,  Revue belge de Philologie et d’Histoire, 68-3, p. 548-564.

Saad, Wisam, 2021, La métaphore dans le discours politique. Les articles de Lluis Bassets à titre d’exemple, Editions Notre savoir.

Searle, John, 1982, Sens et expression, trad. fr., Paris, Minuit (1e édition 1979, Expression and Meaning, Cambridge, Cambridge University Press).

Sperber, Dan et Wilson, Deirdre, 1989, La pertinence, trad. fr., Paris, Minuit (1e édition 1986, Relevance, Communication and Cognition, Oxford, Blackwell).

Spinhirny, Frédéric, 2003, La métaphore dans le commentaire politique, Paris, L’Harmattan.

Spinhirny, Frédéric, 2015, Éloge de la dépense. Le corps politique comme métaphore, Sens et Tonka.

Sacks, Sheldon, dir., 1978, On Metaphor, Chicago, The University of Chicago Press.

« Special Issue on Metaphor », 1978, Critical Inquiry, 5/1.

Comité scientifique

Cécile Alduy, Pr. de littérature et civilisation française à Stanford University

Ruth Amossy, Pr. émérite de culture française à l’Université de Tel-Aviv

Paul Bacot, Pr. émérite de science politique à Sciences Po Lyon

Marc Bonhomme, Pr. de linguistique française à l’Université de Berne

Yves Déloye, Pr. de science politique à Sciences Po Bordeaux

Dominique Desmarchelier, MCF honoraire de sciences du langage

Marianne Doury, Pr. de sciences du langage à l’Université Paris-Descartes

Chloé Gaboriaux, MCF HDR de science politique à Sciences Po Lyon

Anne-Marie Gingras, Pr. de sciences politiques à l’Université du Québec à Montréal

Gaëtan Gorce, Secrétaire général de l’Institut François Mitterrand

Christian Plantin, Pr. émérite de sciences du langage à l’Université Lumière Lyon 2

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Le ou la COVID-19 ? Les réflexions d’Ange Bizet

9 juin 20209 juin 2020 Chloé Gaboriaux

Alors que tout le monde dit « le covid », l’Académie nous invite à préférer « la covid ». Ange Bizet revient pour nous sur cette prise de position à contre-courant.

Dans la rubrique “Dire, ne pas dire” de son site internet, au chapitre des “emplois fautifs”, l’Académie française a publié le 7 mai dernier le communiqué suivant, sous le titre “le covid 19 ou la covid 19” :

“Covid est l’acronyme de corona virus disease, et les sigles et acronymes ont le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation. On dit ainsi la S.N.C.F. (Société nationale des chemins de fer) parce que le noyau de ce groupe, société, est un nom féminin, mais le C.I.O. (Comité international olympique), parce que le noyau, comité, est un nom masculin. Quand ce syntagme est composé de mots étrangers, le même principe s’applique. On distingue ainsi le FBI, Federal Bureau of Investigation, « Bureau fédéral d’enquête », de la CIA, Central Intelligence Agency, « Agence centrale de renseignement », puisque dans un cas on traduit le mot noyau par un nom masculin, bureau, et dans l’autre, par un nom féminin, agence. Corona virus disease – notons que l’on aurait pu préférer au nom anglais disease le nom latin morbus, de même sens et plus universel – signifie « maladie provoquée par le corona virus (“virus en forme de couronne”) ». On devrait donc dire la covid 19, puisque le noyau est un équivalent du nom français féminin maladie. Pourquoi alors l’emploi si fréquent du masculin le covid 19 ? Parce que, avant que cet acronyme ne se répande, on a surtout parlé du corona virus, groupe qui doit son genre, en raison des principes exposés plus haut, au nom masculin virus. Ensuite, par métonymie, on a donné à la maladie le genre de l’agent pathogène qui la provoque. Il n’en reste pas moins que l’emploi du féminin serait préférable et qu’il n’est peut-être pas trop tard pour redonner à cet acronyme le genre qui devrait être le sien.”

Ce communiqué de l’Académie appelle plusieurs réflexions.

Le nom du virus :

Coronavirus est le nom couramment employé pour un virus à couronne. La désignation terminologique officielle est SARS-CoV-2. La forme orthotypographique (intervalles, majuscules, tirets…) constitue le terme normalisé. On trouve d’autres formes codées qui n’ont pas été officialisées. La partie désignant la maladie SARS, a été adaptée à la syntaxe française, en SRAS « syndrome respiratoire aigu sévère », mais le code de désignation du virus reste dans l’ordre syntaxique anglo-saxon, déterminant-déterminé. Ce virus a aussi, surtout au début, été couramment désigné de différentes manières comme virus de Wuhan ou virus chinois.

Dans le texte de la recommandation, « corona virus » est écrit en deux mots. Selon la syntaxe classique française, ce devrait être « virus corona ». Le déterminant se place devant le déterminé dans le mot composé, il convient donc d’écrire coronavirus. En l’écrivant en deux mots, l’Académie introduirait un anglicisme, or même en anglais on l’écrit en un seul mot, comme on le fait aussi dans les autres langues romanes.

Le nom de la maladie :

L’usage courant a d’abord été de désigner l’affection par le nom de l’agent selon le procédé métonymique habituel.
L’OMS (Organisation mondiale de la santé) a codifié l’appellation internationale COVID-19, acronyme sur l’anglais CO(rona)+VI(rus)+D(isease)-(20)19.Corona et virus sont issus du latin scientifique international ; disease est un mot anglais pour « maladie ». Comme le signale l’Académie, selon la tradition, on aurait eu le latin morbus. Dans l’acronyme lexicalisé, le d est démotivé en français. On comprendrait que l’Académie recommande covim avec le m de morbus pour conserver une composition classique. La forme bâtarde COVID ne fait que confirmer la substitution de l’anglais au latin comme langue scientifique de référence internationale. COVID est donc un anglicisme.

En fait COVID-19 est une de ces désignations techniques, un code alphanumérique à usage terminologique, taxonomique, une référence de classement technique ou commercial dont les composants, chiffres, lettres, ponctuations et autres signes graphiques, émaillés de sigles, acronymes, mots en général anglais. Qu’ils soient motivés, aléatoires ou arbitraires, dans l’usage courant ils sont largement démotivés.
Entre codes et noms déposés, ces désignations sont de plus en plus fréquentes dans la communication, par exemple pour des véhicules (C3 Aircross Rip Curl, R4L, B777-300ER, AMX30…), comme substituts onomastiques, désignations topographiques faisant office de toponyme (cote 304), ou odonymique (A6b, GR20), etc.

De tels codes posent un problème langagier, grammatical, orthographique, syntaxique… Pour l’emploi discursif de ce type d’appellations non linguistiques, le traitement grammatical minimal consiste à leur affecter un article, donc un genre et un nombre, sans qu’il soit possible à l’unité « lexicale » de porter les marques flexionnelles. Cela permet au moins une intégration syntaxique.

Pour s’exprimer couramment, on utilise un nom ordinaire. Alors, comment nommer en français les maladies causées par les coronavirus ?
Suivant les structures productives régulières du français, pour former un nom de maladie, on procède par suffixation en -ite, -pathie ou -ose, (hépatite, neuropathie, dermatose). Virose est attesté depuis 1952. Il suffit d’employer coronavirose déjà en usage pour les affections animales (et c’en est une). En contexte, point n’est besoin de plus de précision ; on se contente généralement de parler de grippe et de rhume, dont les souches virales sont multiples.

Le genre :

Covid-19 a d’abord été compris comme un autre nom du virus. L’usage a spontanément été le masculin. Huit semaines plus tard, l’Académie publie une remontrance en faveur du genre féminin (pour une fois qu’un nom de calamité était masculin !).

Que covid-19 soit féminin ou masculin n’a aucune importance puisque les deux genres conviennent aux noms de maladies (un rhume, une lombalgie, un lumbago). Le choix du genre de tels codes ne présente aucun enjeu pour la langue  française.

La justification avancée est : « Les sigles et acronymes ont le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation ». Dans les exemples choisis en anglais, Bureau et Agency, ont leur équivalent direct, puisque d’origine française (comme par essence la moitié la plus savante du lexique anglais), le genre ne fait donc pas de doute en français, mais cela ne tient pas compte du fait qu’en anglais ces mots n’ont pas de genre défini. De toute façon, quand un mot est emprunté, il ne conserve pas ses caractéristiques grammaticales. Il peut changer de genre, ou de nature. Même quand la forme en est conservée, nombreux sont les noms qui changent de genre en changeant de langue, la samba est masculin en brésilien, l’ancienne monnaie allemande le mark, est die Mark en allemand, etc.

L’Académie s’appuie donc sur l’hypothèse qu’il faudrait affecter l’acronyme du genre du mot français résultant de la traduction. Le résultat n’est pas évident, puisqu’on pourrait aussi bien traduire par un nom masculin, par exemple simplement mal qui depuis longtemps sert à désigner des affections (haut mal, mal de Pott…). On peut très bien traduire par « mal du coronavirus ».

Si on prend en considération l’étymologie, disease est une forme préfixée de ease, issu du français aise,nom féminin certes, mais le véritable équivalent avec préfixe péjoratif est malaise, qui, s’il a pu être féminin est maintenant bien masculin[1].

Il n’y a donc aucune détermination automatique du genre de l’emprunt.

L’ironie est qu’à la différence de l’anglais qui n’a pas de genre grammatical pour ces mots, en latin, morbus (justement revendiqué par l’Académie) est masculin.

La justification avancée pour contredire un emploi établi prend donc un caractère arbitraire.

Le ton de la conclusion de l’Académie est modéré, au conditionnel, « l’emploi du féminin serait préférable », « le genre qui devrait être le sien », mais sous la rubrique « Emplois fautifs ». Cela est donc reçu comme injonction impérieuse de l’Autorité linguistique. En l’occurrence, cette autorité est en contradiction avec son principe constamment énoncé, de soumission à l’usage.

Plutôt que de semer une insécurité linguistique supplémentaire, l’occasion était belle de proposer pour l’usage dans la langue courante un vrai mot de formation classique, au lieu de cautionner un anglicisme en forme de code chiffré.

Les désignations à usage scientifique universel ont leur utilité de référence taxonomique, mais l’Académie traite de la langue, et en français, on n’utilise pas « Felis silvestris catus (Linnaeus, 1758) » pour appeler un chat « un chat ».

L’Académie n’a pas encore publié l’article « virus » dans la neuvième édition de son dictionnaire en cours d’achèvement, il est peut-être temps encore de traiter le dérivé virose comme nom de maladie, et d’y inclure coronavirose.

Ange Bizet


[1] L’ancien français a connu de multiples variantes orthographiques (Cf. La Curne de Sainte-Palaye, Dictionnaire historique de l’ancien langage françoise), et désaisé (« Dictionarie » de Cotgrave). Malaissé a eu le sens de malade » (1398).

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L’analyse du discours en Afrique francophone

4 novembre 20194 novembre 2019 Chloé Gaboriaux

Les 7 et 8 juin 2020, l’Université Félix Houphouët-Boigny (Côte d’Ivoire) accueillera les journées d’étude et de lancement du Réseau Africain d’Analyse du Discours, organisées par nos collègues Djédjé Hilaire Bohui (UFHB, Côte d’Ivoire), Aimée-Danielle Lezou-Koffi (UFHB, Côte d’Ivoire), Fallou Mbow (UCAD, Sénégal) et Kalidou Sy (UGB, Sénégal). Pour télécharger l’appel à communications, c’est ici !

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Politique !

31 août 201931 août 2019 Chloé Gaboriaux

Notre dico s’enrichit d’une nouvelle entrée : “Politique”, par Michelle Lecolle.

A lire ici.

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« Nous avons besoin d’Europe »

19 mai 201920 mai 2019 Chloé Gaboriaux

En préférant « nous avons besoin d’Europe » à « nous avons besoin de l’Europe », les acteurs politiques de droite comme de gauche qui reprennent cette affirmation la font sonner comme un besoin d’amour ! Avec le déterminant « l’», elle aurait renvoyé à une entité bien réelle, qu’on connaît sous le nom d’Union européenne, avec son dispositif institutionnel complexe, ses avancées et ses impasses. Mais l’expression en fait l’économie, donnant à l’Europe une dimension virtuelle. Elle perd de sa dimension concrète pour ne garder que ses significations générales – devenant ici un idéal, une valeur ou, qui sait ?, un sentiment.

Le gain poétique est aussi politique. Les destinataires qui se reconnaissent dans le « nous » sont invités à la voir positivement – s’ils en ont besoin, n’est-ce pas qu’ils en manquent ? – sans que celui ou celle qui les y enjoint n’ait à justifier sa position. Libérée de son déterminant, l’Europe l’est aussi de ses déterminations et de son ancrage historiques, comme si elle était un bien universel auquel tous ont droit, quelles que soient ses réalisations particulières. Chacun peut donc se l’imaginer comme il l’entend, qu’importe le bord politique !

Mais de la même manière que notre besoin d’amour ne peut être satisfait que par l’amour d’êtres bien réels, notre besoin d’Europe ne mérite-t-il pas de se fixer sur un projet un peu mieux défini ?

Mise en ligne : mai 2019

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“Je n’ai pas l’Europe naïve”

10 mai 201920 mai 2019 Chloé Gaboriaux
(Emmanuel Macron, Le Grand débat, BFMTV, 4 avril 2017)
Attaquée de toutes parts lors du Grand Débat, l’Union européenne a trouvé son chevalier servant en la personne d’Emmanuel Macron. Après avoir assuré qu’il l’avait “au coeur”, l’animateur d’En Marche ! s’est pourtant défendu de tout optimisme excessif par une étrange construction attributive. L’expression “avoir + substantif + adjectif” n’est pas rare, mais elle est généralement employée avec des termes qui renvoient sans difficulté au sujet du verbe. On pourrait en effet affirmer sans grande originalité que le jeune aspirant à la présidence de la République “a le regard clair” ou “l’esprit ouvert”. Prétendre “ne pas avoir l’Europe naïve” est en revanche peu banal. Il y a là une forme d’appropriation, qui souligne la proximité du candidat avec l’Europe. L’effet est renforcé par une figure de style plutôt délaissée dans cette campagne, l’hypallage, qui assigne à l’Europe un défaut qu’on ne peut dénoncer que chez Emmanuel Macron. Ce dernier fait ainsi corps avec l’UE tout en en reconnaissant du bout des lèvres les insuffisances… ce qui ne suffira sans doute pas à en faire aux yeux de ses adversaires “une chance pour tous” !
Crédits photos : Thomas Trutschel
Mise en ligne : avril 2017
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“L’Europe, on la change ou on la quitte”

10 mai 201920 mai 2019 Chloé Gaboriaux

(Jean-Luc Mélenchon, 24 juin 2016 – sur son blog – repris le 5 février 2017 dans un entretien au Parisien)

Jean-Luc Mélenchon transforme un slogan lancé dans les années 1980 par l’extrême droite, avant d’être repris par Nicolas Sarkozy : “la France, aimez-la ou quittez-la”. Se taire ou partir, c’était “à prendre ou à laisser” : l’ultimatum avait connu un grand succès. Les variations introduites par Jean-Luc Mélenchon au lendemain du Brexit sont importantes. Il ne se contente pas de substituer l’Europe à la France, mais modifie les destinataires de l’injonction, dans lesquels il s’inclut (“on”) tout en nuançant la première option : il ne s’agit pas de prendre l’Europe telle qu’elle est, mais de la “changer” ou, à défaut, de la quitter. L’alternative n’en reste pas moins catégorique : Jean-Luc Mélenchon confirme ici son intransigeance. Mais la substitution terme à terme suffira-t-elle à faire oublier les usages droitiers de la formule ? Mélenchon  ne risque-t-il pas de brouiller son message en le rapprochant du souverainisme frontiste ?

Mise en ligne : février 2017

Posted in Européennes, Figurez-vous...Tagged alternative, Jean-Luc Mélenchon

Ne travaillez jamais !

28 mai 2018 Chloé Gaboriaux

L’injonction, à laquelle l’adverbe « jamais » donne un caractère définitif, est empruntée au situationniste Guy Debord, qui, dès 1953, l’inscrit à la craie sur un mur de la rue de Seine. Elle est reprise en mai 1968 par les Enragés, qui, fidèles à l’héritage marxiste, défendent à leur tour l’abolition du travail sous la forme aliénante qu’il a prise dans la société capitaliste. À l’université où l’on débat déjà sur le rôle de l’enseignement supérieur – professionnalisation ou formation intellectuelle ? – le slogan s’enrichit de significations nouvelles : étudiants, restez jeunes, inventifs, libres ! L’ordre social ici contesté est à la fois social et générationnel : c’est celui de « la valeur travail », défendue par les bourgeois qui renvoient les révolutionnaires aux exagérations de la jeunesse. La paresse devient alors subversive, mais au même titre que les autres activités émancipées de la loi du marché, celles dont la valeur est incommensurable à la rencontre entre l’offre et la demande : la solidarité, l’art, la révolution !

Photo : Jo Schnapp. “L’Imagination au pouvoir” © Editions Allia, Paris, 2018

 

 

 

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La bourgeoisie n’a pas d’autre plaisir que de les dégrader tous

25 mai 2018 Chloé Gaboriaux

Cet aphorisme s’inscrit dans la longue lignée des slogans et graffitis qui condamnent la classe bourgeoise. Cette dernière n’y est pas caractérisée par sa position dans les rapports de production et de domination, mais par un trait plus culturel : son attitude à l’égard du plaisir. Ces quelques mots font donc moins référence au marxisme qu’à la figure stéréotypée du bourgeois, laquelle, dès le XIXe siècle, s’oppose dans les représentations sociales à la bohème, dont le monde estudiantin a toujours été proche. Contrairement à cette bohème souvent identifiée à une avant-garde, elle est marquée par la médiocrité de ses goûts, inaccessible à l’idéal, engluée dans un consumérisme satisfait et conformiste. Tous ses plaisirs ne peuvent donc être que « dégradés », « abîmés », et ce « d’une manière infâmante », c’est-à-dire déchus de la place qui leur est assignée par les révolutionnaires de mai. Pour ceux qui appellent au contraire à jouir sans entraves ni interdits, les loisirs bourgeois ne sont pas seulement méprisables : ils pourraient même nous « gâcher le plaisir » !

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Le discours est contre-révolutionnaire

21 mai 2018 Chloé Gaboriaux

Alors que fleurissent partout les injonctions subversives, ces quelques mots inscrits sur l’un des murs de l’Université de Nanterre jouent le paradoxe : on s’attend à ce qu’ils appellent comme les autres slogans à la révolution, et voilà qu’ils affirment leur caractère « contre-révolutionnaire » ! À y regarder de plus près, le discours a en effet de quoi freiner toute émancipation. Ne s’oppose-t-il pas aux actes, maintenant ainsi le Grand Soir à l’état de vaine rhétorique ? Ne fixe-t-il pas une idée directrice qui s’impose à son destinataire, lui volant par là-même ses capacités d’invention et d’innovation ? Pire encore, parce qu’il ne peut s’affranchir ni des règles de la langue, ni de l’écho des textes déjà prononcés, ni de ses propres conditions d’énonciation, l’inédit lui échappe immanquablement ! La langue elle-même est « fasciste », « car le fascisme, ce n’est pas d’empêcher de dire, c’est d’obliger à dire », nous dit Roland Barthes quelques années plus tard. Mais c’est pour affirmer quelques lignes plus loin qu’on peut toujours « tricher avec la langue » pour l’entendre « hors-pouvoir » : n’est-ce pas en effet le lot de toutes les révolutions que de libérer la parole ET l’action, en devenant parole en action et action portée par la parole ?

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