Frédéric Says, France Culture, 7 décembre 2018
Pourquoi le gouvernement n’a-t-il rien senti de la colère qui montait en France et annonçait le mouvement des gilets jaunes ? se demandait Frédéric Says le vendredi 7 décembre sur France Culture dans son billet quotidien. La réponse tient à la fois à la nature du parti présidentiel et à la conception que le gouvernement et le président ont de leur mission. LREM n’est pas un parti ancien. Cet avantage sur les autres partis, qui promet un renouveau en politique, occasion bienvenue d’échapper au ressassement stérile, a été en l’occurrence un handicap : ce parti est trop récent pour disposer d’un réseau d’élus locaux qui auraient pu être les oreilles du pouvoir. Frédéric Says le formule ainsi : « On pourrait parler d’un parti nénuphar, qui flotte mais qui n’a pas de racines ». Cette métaphore innovante bénéficie, contrairement à LREM, d’un réseau assez fort et bien ancré : un parti peut être localement « implanté », « enraciné » (ce qu’on retrouve dans la mention des « racines ») et avoir un « terreau » de soutien. Tout cela manque au nénuphar, qui s’il croît comme les autres plantes à l’air libre, le fait en pure surface, sans racines, sans terre, n’émergeant que grâce au volume inconsistant de l’eau : il « flotte ». Et tel est bien ce que promeut le pouvoir issu de LREM : le nénuphar, c’est l’image de la start-up, développant sa croissance en surface du présent, sans besoin de profondeur historique ni de substance traditionnelle.